LES PEINTURES CONTENANT DU PLOMB... COMMENT DOIT-ON LES GÉRER ?
Au Québec et au Canada, les surfaces telles que les murs, les planchers et les plafonds, ainsi que d’autres éléments et équipements de la majorité des bâtiments érigés avant 1990 peuvent être recouverts de peintures contenant du plomb. Ces peintures sont sans danger lorsqu’elles sont en bon état, mais peuvent représenter un risque pour la santé humaine si elles sont détériorées ou si des travaux sont entrepris sans mettre en place les protections adéquates.
RISQUES
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), certains groupes d’individus, notamment les fœtus, les nourrissons, les enfants et les femmes enceintes, sont de façon générale plus sensibles aux effets néfastes du plomb, même à de faibles concentrations.
Le plomb est difficilement éliminé par l’organisme (phénomène de bioaccumulation). Il est cancérogène et peut affecter le système nerveux central et périphérique, cardiovasculaire, reproducteur, sanguin et rénal. Le plomb est également toxique pour la faune et la flore terrestre et aquatique.
CADRE LÉGAL
Au milieu du XXe siècle, la concentration de plomb utilisé comme pigment dans la peinture à l’huile pouvait atteindre 500 000 mg/kg. L’usage de la peinture au plomb était généralisé jusqu’aux années 1960. Or, on s’est aperçu que de telles concentrations étaient très dangereuses pour la santé.
En 1976, le gouvernement fédéral adopte ainsi un règlement limitant à 5 000 mg/kg la teneur totale en plomb des peintures d’intérieur. Puis, au début des années 1990, les fabricants de peinture canadiens cessent pratiquement d’utiliser le plomb comme additif dans les peintures d’usage résidentiel (concentration limitée à 600 mg/kg). En 2005, cette limite est étendue à toutes les peintures, excepté celles anticorrosion (ex. : apprêts métalliques, peintures extérieures, marquage routier). Enfin, depuis 2010, la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation (L.C. 2010, ch. 21) et le Règlement sur les revêtements (DORS/2016-193) stipulent que la teneur totale en plomb des peintures en vente libre ne peut pas dépasser 90 mg/kg.
Par ailleurs, le plomb est une substance toxique aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (L.C. 1999, CH. 33). Et selon l’article 3 du Règlement sur les matières dangereuses (RLRQ, c. Q-2, r. 32), en vigueur au Québec, une peinture contenant du plomb et son substrat peuvent être considérés comme des matières dangereuses représentant un risque pour l’environnement, si le plomb qu’elles contiennent est lixiviable dans l’eau.
En résumé, la législation est claire concernant le plomb dans les peintures en vente libre, mais qu’en est-il de la gestion des peintures existantes dans les bâtiments construits avant 1990?
ENJEUX
En fait, si votre bâtiment date d’avant 1990, il y a de fortes chances que les peintures appliquées sur les différentes surfaces contiennent du plomb en quantité significative. Ces peintures doivent être gérées adéquatement lorsqu’elles sont en mauvais état afin d’assurer la sécurité des usagers et, dans le cadre de travaux, celle des ouvriers.
Malheureusement, il n’existe actuellement aucune valeur limite légale pour la concentration en plomb autorisée dans les peintures existantes appliquées dans un bâtiment.
Cela dit, les ouvriers du domaine de la construction sont de plus en plus sensibilisés aux dangers du plomb présent dans les peintures, et il est désormais courant que les inspecteurs de la CNESST exigent des procédures de travail spécifiques pour limiter au maximum l’exposition des travailleurs au plomb. La présence de plomb dans les peintures peut ainsi représenter un véritable casse-tête logistique et financier pour les gestionnaires, si ce contaminant n’est pas géré en amont, avant la réalisation des travaux.
TESTS
Afin de déterminer si une peinture présente dans un bâtiment pose un risque pour les travailleurs, les usagers ou l’environnement, des échantillons de chacune des peintures visées doivent être prélevés et soumis à deux types d’analyse.
L’analyse de la teneur en plomb est réalisée sur un échantillon d’écailles de peinture afin de déterminer si cette dernière contient du plomb et présente un risque pour la santé humaine. Également mené sur un échantillon d’écailles de peinture, le test de la lixiviation permet quant à lui de déterminer si le plomb présent dans cette peinture se dissout dans l’eau au-delà de la limite permise.
CONTRÔLE DURANT LES TRAVAUX
La gestion des peintures contenant du plomb dans le cadre de travaux comporte toujours deux volets, à savoir la protection des travailleurs et la protection de l’environnement (si la peinture est lixiviable).
Durant des travaux sur des surfaces recouvertes de peinture contenant du plomb, les travailleurs doivent ainsi porter une protection vestimentaire et respiratoire. Des enceintes de travail étanches sont également nécessaires. Et il faut éviter de poncer mécaniquement ou de décaper à chaud les surfaces pour enlever les peintures, car c’est lors de ces opérations que la peinture libère le plus de plomb sous forme de fumées ou de poussières fines.
À ce sujet justement, le Code de sécurité pour les travaux de construction (RLRQ, S-2.1, r. 4), en vigueur au Québec, mentionne dans son article 3.2.12 qu’un vestiaire double pourvu d’une douche doit être mis à la disposition des travailleurs, lorsque les travaux réalisés sont susceptibles de produire des poussières ou des vapeurs de plomb.
Au Québec toujours, les matériaux provenant de travaux de construction, de démantèlement ou de rénovation de bâtiments ou d’infrastructures recouverts de peinture contenant du plomb lixiviable sont considérés comme présentant un risque pour l’environnement et doivent être éliminés dans un lieu de dépôt définitif de matières dangereuses, conformément au Règlement sur les matières dangereuses.
CONCLUSION
Les peintures contenant du plomb, si elles ne sont pas endommagées, peuvent être laissées en place sans danger. Cependant, si elles sont en mauvais état ou si des travaux sur ou près de ces revêtements sont planifiés, il est nécessaire de respecter des procédures d’enlèvement adéquates afin de limiter les risques qu’elles peuvent représenter pour les travailleurs et l’environnement.